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Le codir qui voulait être Agile

L’histoire d’une joyeuse équipe dirigeante qui n’était pourtant pas prédisposée au départ , s’est retrouvée à collaborer de manière agile dans un projet fédérateur.

(Article rédigé pour l'ouvrage Collectif "Rupture Douce #5"

Il était une fois, la « Vision »

Voici comment tout a commencé.

Coach’agile interne, j’ai été missionné par mon nouveau Big Boss, le DSI, pour organiser un brainstorming avec son équipe, le comité de direction (Aka LE Codir), lors d’un atelier permettant de définir collectivement la vision de ce que pourrait être la DSI dans quelques années.

Il me délègue la préparation et l’animation d’un séminaire dédié

Dans sa nouvelle incarnation, notre nouveau DSI rapporte sa sensibilisation agile, il a déjà pratiqué notre discipline avec son dernier Codir et souhaite recommencer pour retrouver le plaisir éprouvé et l’efficacité constatée.

Rendez-vous est pris dans 2 semaines, temps de la réflexion individuelle de chaque membre de l’équipe et du partage sur notre facebook local.

L’ADN de l’équipe n’est pas vraiment nourri du collectif, j’emmène donc ce petit monde dans l’environnement décalé d’une startup dans laquelle nous sommes accueillis par un vieil utilitaire « Tube » Citroën reconverti en mini salle de réunion.

L’ambiance est posée, les post-it affluent quand je propose de « s’orienter vers la solution » en allant sur la lune !

Cet atelier propose à l’équipe de se focaliser sur l’objectif à atteindre (et non pas de chercher régler un problème, ce qui change fondamentalement la façon dont l’équipe perçoit le but et donc l’état d’esprit dans lequel il s’inscrit lors de l’atelier) .

Les membres du Codir énumérent ensuite les forces de la DSI. Un temps de pause est donné pour que l’équipe s’autoévalue sur une échelle allant de 1 à 10.

La question finale est simple « Et si nous faisions un pas de plus, quel serait-il, quelles seraient les actions et décisions à prendre pour y arriver ? »

Fin de journée, une série d’ateliers plus tard :

Nous avons 4 mois devant pour présenter une trajectoire claire à la strate hiérarchique supérieure afin de lancer la transformation. Il y a beaucoup de pistes, on sait où l’on va, maintenant il faut détailler.

Première manche gagnée, la deuxième mission est donnée : produire une définition fine des axes de transformation de la DSI de façon collaborative.

A ma proposition de mise en place d’une démarche itérative, un festival d’enthousiasme me répond, le Codir est en liesse,

Certains chantent, d’autres dansent, ou encore jettent des cotillons !!

…Euh non, pardon, je m’égare, la fête est dans ma tête, car c’est palpable : quelque chose a changé, l’équipe est d’accord pour tester un nouveau mode de fonctionnement !

L’agilité par l’expérimentation de pratiques

Pour surfer sur la dynamique créée par les ateliers, je reprends les outils de bases de l’agilité :

Une vision claire de la cible a atteindre, une liste d’actions priorisées, un tableau de management visuel pour rendre les blocages visibles, des réunions hédbo de partage des blocages

Rendez-vous dans un mois, dans un autre lieu pour échanger et prendre collectivement les arbitrages nécessaires.

L’auto-organisation pour la réalisation : les membres de l’équipe intéressés par tel ou tel sujet s’organisent pour avancer ensemble.

J’ai aussi les clés du camion (pas le tube de la startup, celui-là est resté là où il était) pour organiser les « journées Agile du Codir ».

Tous les mois, je délocaliserai, m’appuyant sur les résultats de la première journée d’intelligence collective.

Le groupe a identifié quatre thématiques de travail pour ces séminaires mensuels de deux jours :

  • « Travailler mieux ensemble » : Pendant une réunion dédiée à la recherche d’amélioration des interactions au sein de l’équipe. J’imagine des nouveaux formats de rétros, les joue parfois avant pour les vérifier en conditions opérationnelles dans des équipes projets cobayes.

  • « Faire un point précis d’avancement » : les sous-groupes partagent l’avancée des travaux, les nouvelles orientations à débattre, les décisions à prendre (Repenser les relations avec nos partenaires de demain, proposer un plan de recrutement en phase avec les budgets, imaginer de nouvelles stratégies d’urbanisme…). Les itérations n’attendent pas vraiment des sujets finis, il s’agit plutôt de points de rencontre : on montre ce qui est fait, on cherche à statuer sur des éléments forts sans attendre que tout soit terminé.

  • « Faire rentrer le dehors dedans » : des intervenants externes viennent partager leurs expériences de transformations dans d’autres contextes, des membres de nos équipes nous parlent de ce que notre direction sait déjà faire.

« Faire un pas de plus » : prendre un sujet plus complexe ou qui n’arrive pas à être ou dont les décisions ne sont pas simples et l’équipe le traite pendant de nouvelles séances d’intelligence collective. Toute la palette est visitée : world café, innovation games, format type open forum, icebreaker systématiquement tournés vers les valeurs agiles ou la collaboration etc. …

Une seule équipe, plusieurs visions du monde.

La transformation est vu comme un produit pour lequel le responsable est un rôle assuré par le DSI : il donne le cap, priorise et clarifie quand c’est nécessaire.

En tant que coach, je facilite et cherche à garantir les pratiques agiles nouvelles pour cette équipe.

L’équipe : les membres du CODIR. J’ai fait le pari de les faire travailler dans un mode de fonctionnement Agile.

Un pari, en effet.

Cette équipe n’en est pas une : chaque membre à une direction propre et ils ne se rejoignent que sur des rares sujets annuels (RH, Budget) pour lesquels trouver des consensus n’est pas une option mais une obligation.

Mon mandat de coach est d’amorcer une transformation de ce qui est un groupe sans sens commun, un embryon d’équipe collaborative qui ne partage pas les mêmes visions du monde. Le sujet est un excellent alibi qui leur permet, cette fois, de travailler ensemble. d’ailleurs, les échanges se font, des besoins de collaboration émergent naturellement et des réunions s’organisent « d’elle-mêmes » sans demande explicite.

Un autre pari sous-jacent consiste à faire couler les pratiques et l’état d’esprit agile « par la tête », et aussi de faire vivre à la tête ce que leurs équipes vivent au quotidien dans les projets.

Les ambitions de progressions personnelles restent omniprésentes pour certains, la défense des territoires quasi constante, les objectifs de silos cherchent à se faire passer pour des intérêts communs.

Les individualités s’expriment fortement, les clans et les alliances se reforment, et parfois le cadre collaboratif proposé est rejeté.

Bref, un Codir, c’est un peu comme une équipe normale mais dans laquelle tout semble exacerbé : égo, ambition, réactions sous stress, culture du chef, clanisme ou encore intérêts cachés.

Cependant, le résultat est là : projet validé. La transformation a été lancée dans les semaines qui ont suivi …

Et surtout les postures ont commencé à changer, les membres du Codir ont pris un véritable plaisir à travailler ensemble et ont découvert des vertus des quelques pratiques mises en place, on appris à mieux se connaître, se reconnaître des qualités et à apprécier l’ambiance

Des pratiques, des postures et un état d’esprit

La collaboration est née dans un groupe où elle ne se manifestait que rarement.

La vision, le maintien de son cap, l’apport expérientiel de pratiques ont constitué la clé de voûte de cette agilité.

Finalement …un Codir est une équipe de réalisation comme les autres. Des pratiques agiles adaptées à ses propres codes et attentes : ça marche !!

Pour aller plus loin

« Aller sur la lune » est une métaphore servant de prétexte et d’introduction à un atelier « Solution Focus » https://www.rupture21.com/solution-focus